
Portrait dâentrepreneurs : #6 Yasmine Dahmane et Lucas Graffan â La Consigne GreenGo
July 27, 2022

Il nây a plus de plan B pour la planĂšte, plus de dĂ©rogation, plus de lobbies qui tiennent !
Ils sont le cĆur de la fondation, celles et ceux qui nous font partager leurs plus belles aventures et leurs plus difficiles challenges, dont nous adorons suivre lâĂ©volution, comprendre le produit, analyser le marché⊠Focus sur nos entrepreneuses et entrepreneurs Ă travers une sĂ©rie de portraits. â€
Et si rĂ©utiliser devenait aussi simple que jeter ? Câest lâambition de Yasmine Dahmane et Lucas Graffan, co-fondateurs de La Consigne Greengo ! FondĂ©e en 2018, la startup permet aux acteurs de la restauration de crĂ©er le modĂšle de rĂ©emploi des emballages adaptĂ© Ă leurs besoins et aux exigences lĂ©gislatives. Ils accompagnent ainsi leurs clients dans leur transition du jetable vers un modĂšle de consigne rĂ©utilisable, militant ainsi pour une consommation consciente et pĂ©renne.
Quâest-ce qui vous a poussĂ© Ă entreprendre ?
Yasmine : Câest en ayant travaillĂ© tous les deux dans des grands groupes quâon a eu un dĂ©clic sur notre responsabilitĂ© Ă©cologique et les enjeux de notre sociĂ©tĂ©. De mon cĂŽtĂ©, je travaillais sur une plateforme pĂ©troliĂšre donc jâavais une vision assez âdirecteâ du dĂ©sastre environnemental causĂ© par les Ă©nergies fossiles. Lucas, mon associĂ©, a Ă©galement travaillĂ© dans un grand groupe qui produisait de la lessive : pour lui aussi le dĂ©clic a Ă©tĂ© relativement rapide, face aux millions de tonnes de packaging produits !
Lucas : On cherchait un projet avec du sens, et on avait cette volontĂ© de crĂ©er une entreprise Ă impact. CâĂ©tait pour nous un point essentiel au vu des enjeux environnementaux actuels. Notre âdĂ©clic communâ nous a donc permis de nous lancer Ă 100% dans notre projet. La vie dâentrepreneur est Ă©galement hyper excitante, mais ce qui nous drive vraiment câest lâĂ©nergie que lâon donne pour une cause Ă laquelle on croit et qui nous dĂ©passe.
De quel constat est né le projet la Consigne GreenGo ?
Lucas : Le constat est simple : on utilise trop dâemballages jetables au quotidien. En France, on a chaque annĂ©e 13 milliards dâemballages Ă usage unique qui concernent la partie vente Ă emporter et plus de 2 millions de tonnes dâemballages jetables par an.

Aujourdâhui, le taux de recyclage des emballages est infĂ©rieur Ă 9% au total et on atteint 20% concernant la poubelle jaune. Conclusion : on ne recycle (quasi) rien ! Il y a donc une vraie urgence Ă trouver des alternatives. Le packaging rĂ©utilisable quâon met en place rĂ©pond Ă la problĂ©matique environnementale de lâĂ©puisement des ressources. Ce sont des dĂ©chets quâon Ă©vite car on prend le problĂšme Ă la source en rĂ©duisant la consommation dâemballages drastiquement.
Yasmine : En plus de ça, on sait que la rĂ©utilisation a un bilan carbone positif par rapport au jetable. Tous ces critĂšres combinĂ©s montrent que câest une Ă©vidence ! On peut prendre lâexemple de la gourde qui prend de plus en plus de place sur nos bureaux et dans notre quotidien, avec une bouteille en plastique qui devient âmal vuâ. Câest un peu comme revenir Ă lâĂ©poque des anciennes gĂ©nĂ©rations, mais en plus moderne et en plus adaptĂ© !

Au-delĂ dâĂȘtre une startup Ă impact, vous avez dĂ©veloppĂ© une vraie technologie de rĂ©utilisation des emballages : pouvez-vous nous en dire plus ?
Lucas : On a dĂ©veloppĂ© une tech qui a pour objectif de faire du parcours de lâutilisation dâun packaging rĂ©utilisable quelque chose dâaussi simple â voir de plus simple â que de jeter son emballage. Nous innovons et permettons Ă nos clients â restaurateurs et distributeurs â de passer au packaging rĂ©utilisable en leur facilitant la vie dâun point de vue opĂ©rationnel et financier. Du cĂŽtĂ© de lâusager final, on veut quâil ait une expĂ©rience enrichie et surtout simple.
Yasmine : On essaye de rendre lâexpĂ©rience client plus ludique pour le consommateur afin quâil se sente valorisĂ© par son geste. On veut que nos consommateurs se rendent compte des enjeux et quâils soient rĂ©compensĂ©s pour leurs actions. Aujourdâhui, on embarque tous nos partenaires vers cette nouvelle façon de communiquer avec les consommateurs. On pense que câest la bonne dĂ©marche pour faire du packaging rĂ©utilisable un standard.
Quel a Ă©tĂ© lâimpact de la Loi AGEC sur votre business ? (La restauration rapide devra, dĂšs le 1er janvier 2023, utiliser de la vaisselle rĂ©utilisable pour les repas et les boissons servis sur place (gobelets, couvercles, assiettes, rĂ©cipients, couverts)).
Yasmine : La loi AGEC nâĂ©tait pas mise en place quand on a dĂ©butĂ© le projet. Il y a 4 ans, on a Ă©vangĂ©lisĂ© le marchĂ©. Quand on a commencĂ© il nây avait pas de loi, tout Ă©tait nouveau et nos clients Ă©taient les âearly adopteursâ avec une grosse fibre RSE. Aujourdâhui, ce nâest pas pour rien que le marchĂ© sâaccĂ©lĂšre. On a une prise de conscience collective avec une opinion publique qui critique lâutilisation dâemballages unique. DeuxiĂšmement, on a une loi qui intervient et qui vient faire exploser le marchĂ©. Les rĂ©fractaires nâont plus dâautres choix que dâadopter les changements nĂ©cessaires. Il y a donc un levier de croissance Ă©norme car on passe dâun marchĂ© de niche Ă un marchĂ© de mass market.
Est ce que vous pensez que cette loi va assez loin ?
Câest bien mais on peut encore aller beaucoup plus loin ! On voit quâil y a des lobbies qui souhaitent faire reculer les Ă©chĂ©ances et rendre plus light le contenu. On peut prendre lâexemple du burger : tous les emballages uniques devaient ĂȘtre supprimĂ©s au 1er janvier 2023. Il y a aujourdâhui des exceptions pour les burgers qui peuvent ĂȘtre wrapĂ©s dans du jetable, idem pour les frites. Câest ce genre de signaux qui prouvent quâon peut aller plus loin, aller plus vite et sauver la planĂšte. Il nây a plus de plan B pour la planĂšte, il nây a plus de dĂ©rogation, plus de lobbies qui tiennent. Si la loi ne va pas dans ce sens, on ne va jamais y arriver !
Dâailleurs, avez-vous dĂ©jĂ Ă©tĂ© consultĂ© par les pouvoirs publics en tant quâexperts ?
Yasmine : Oui, et ça depuis le Day 1 ! On est quand mĂȘme pionniers sur le sujet. En 2019, on a Ă©changĂ© plusieurs fois avec Brune Poirson (alors SecrĂ©taire dâĂtat auprĂšs du ministre de la Transition Ă©cologique et solidaire). Et grĂące Ă de nombreux acteurs qui apportaient des actions similaires, ils ont constituĂ© la feuille de route qui a donnĂ© lieu Ă la Loi AGEC aujourdâhui.
On est Ă©galement trĂšs rĂ©guliĂšrement consultĂ©s par la ville de Paris et on Ă©change notamment avec Florentin Letissier qui est adjoint Ă la maire de Paris en charge de lâĂ©conomie sociale et solidaire.
La ville de Paris Ă de forte ambitions notamment pour les Jeux Olympiques de 2024 et ils ont besoin de porteurs de solution pour rĂ©aliser leurs objectifs. Lâobjectif dâune ville âZero plastiqueâ, sans les startups qui vont accĂ©lĂ©rer le changements, est difficilement possible. Ils nous consultent donc pour des expĂ©rimentations qui pourront par la suite ĂȘtre rĂ©pliquĂ©es pour les JO.
OĂč en est la France vs dâautres pays europĂ©ens en termes de gaspillage ?
Lucas : LâAllemagne, comme les pays nordiques, ont dĂ©jĂ la consigne trĂšs ancrĂ©e dans leur culture : ils ont donc un temps dâavance. Ils ont une loi qui â en 2023 â va imposer aux restaurateurs de proposer une alternative Ă lâemballage jetable, sur place et Ă emporter. La loi AGEC nâest que sur la partie Ă emporter dans un premier temps : ce sont donc deux façons assez diffĂ©rentes de voir les choses.
Sinon il y a dâautres pays comme le Portugal qui a une loi similaire qui devrait ĂȘtre mise en place en 2023. Pour lâEspagne et lâItalie ce sera pour 2024. A lâĂ©chelle EuropĂ©enne, la loi AGEC reste une des lois les plus ambitieuses : on peut sâen fĂ©liciter !
Ton plus beau souvenir en tant quâentrepreneuse/entrepreneur ?
Yasmine : Quand jâai appris que jâĂ©tais enceinte !
Lucas : Moi aussi, quand jâai eu ma fille pendant lâaventure La Consigne GreenGo !
Yasmine : La moralitĂ© est que lâentrepreneuriat nâest pas incompatible avec une vie perso : ce nâest pas facile, câest une lutte au quotidien, mais câest aussi ce qui nous lie avec Lucas dâessayer de maintenir cet Ă©quilibre !
Et justement, on en vient à la fameuse question : comment gérez-vous votre équilibre vie pro / vie perso ?
Yasmine : La rĂ©alitĂ© câest que câest trĂšs trĂšs dur ! Câest un combat de tous les jours : en pĂ©riode de levĂ©e de fonds, câest quasi impossibleâŠ

Lucas : Pour nous la clĂ© câest dâĂȘtre trĂšs soudĂ©s tous les deux. On se parle de tout, on est hyper transparents, que ce soit au sujet pro ou perso. En rĂ©alitĂ©, tu es un peu obligĂ© quand tu es Ă ce niveau lĂ dâassociation dans lâentrepreneuriat, si tu te caches des choses, câest le dĂ©but de la fin !
On forme une team solide et câest ce qui nous permet de nous motiver mutuellement : on a tous les deux des enfants et on se comprend, on a les mĂȘmes contraintes, les mĂȘmes problĂ©matiques. Câest aussi hyper important dâĂȘtre aussi impliquĂ©s lâun que lâautre dans le projet !
Yasmine : Notre plus grande fiertĂ© câest aussi dâĂȘtre hyper alignĂ©s ! HonnĂȘtement il y a eu quelques dĂ©saccords, mais jâai du mal Ă les citer car dĂšs quâon sent quâil pourrait y avoir un non alignement on en parle tout de suite et on rĂšgle le problĂšme. Câest important aussi car on est alignĂ©s auprĂšs des collaborateurs et des autres parties prenantes : Yasmine et Lucas, câest une seule et mĂȘme voix !
Un entrepreneur (une entrepreneuse) qui vous inspire particuliĂšrement ? Qui aimeriez-vous voir dans notre prochaine ITW ?
Yasmine : Pour moi ce serait le Directeur GĂ©nĂ©ral de la MAIF, Pascal Demurger. Rares sont les dirigeants qui font ce quâils disent concernant lâimpact. Il a Ă©tĂ© trĂšs visionnaire, cela fait des annĂ©es quâil lutte pour lâimpact, lâĂ©galitĂ© des chances⊠Câest ce qui explique le fait quâil nây a pas de turnover au sein de la MAIF : les gens sây sentent tellement bien ! Il a su entretenir une culture dâentreprise depuis des annĂ©es, et câest super inspirant !
Lucas : Pour moi il sâagit de Pierre Bellon qui est le fondateur de Sodexo. Il est parti dâune cuisine Ă Marseille Ă une Ă©poque ou câĂ©tait dur dâemprunter, de lever des fonds⊠Il avait de vraies valeurs, il faisait trĂšs attention Ă ses clients et ses employĂ©s : il envoyait des mots Ă la main quand il signait de gros clients ! Lâentrepreneuriat, ce nâest pas que faire une licorne : fonder une boite câest aussi une histoire de vie, on oublie un peu ça aujourdâhui. Lui, il a dĂ©diĂ© sa vie Ă transformer les habitudes de restauration alimentaire en partant dâune cuisine, lâhistoire est folle !
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